Métamorphose

Publié le par Petits Ecrits

C’était la fin du déjeuner et j’attendais le café. La terrasse se vidait, j’étais arrivé après la foule, un peu en décalé. Les banquiers en costume cravate avaient eu le temps de reprendre un expresso et les femmes perchées sur leurs talons aiguilles, de laisser des traces de rouge à lèvres sur les tasses. Les conversations s’éloignaient, les rires s’amenuisaient. Quelques moineaux intrépides commençaient à envahir les lieux que mes pensées me faisaient quitter. Je fermai les yeux et me laissai embarquer. J’avais besoin de cette pause. Les derniers jours avaient été denses et compliqués. J’étais tiré d’affaire, mais ce moment d’attente tombait à pic ! Avant, j’aurais râlé, tempêté, éventuellement fait un scandale pour avoir patienté ne serait-ce que quelques minutes. Quelle différence en ce beau jour de printemps ! Pourtant toujours le même, dans la même ville, le même bureau, avec les mêmes amis… je me sentais si différent !

Aujourd’hui, je n’avais pas seulement les yeux ouverts, je voyais ; je n’entendais pas, j’écoutais, je prêtais attention. La vie ne filait plus, j’avais cessé de courir après ; je la ressentais, je l’habitais à chaque instant. Elle était mienne et j’étais sien.

C’était la fin du déjeuner et j’attendais le café. Mon café. Je n’étais pas celui qui le préparais, mais malgré tout, j’avais posé une intention : il deviendrait le symbole de ma renaissance, de la nouvelle vision que j’avais de mon existence, du monde qui m’entourait, de la relation changée que j’aurai avec mes proches.

En patientant, j’embrassais les alentours du regard : les piétons arboraient des airs vraiment divers. J’aurais voulu consoler ceux qui paraissaient tristes, leur expliquer qu’il n’y a pas si longtemps j’étais comme eux, à regarder mes pieds et le bitume. Aujourd’hui, je marchais la tête haute et la vie était plus belle, elle me souriait. La couleur du ciel entre les immeubles y était pour beaucoup. Je m’étais également aperçu en considérant mon environnement que nombreux étaient ceux qui décoraient leur balcon, y mettaient des choses rigolotes, des symboles destinés à faire rire, à rendre heureux, des plantes.

Un arôme fumé et épicé chatouilla mes narines : le café serait bientôt posé devant moi et je pourrais m’en délecter.

Publié dans Elucubrations

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